Le style « Retour d’Égypte »

Déjà présent au XVIIIe siècle, le goût de l’Égypte connait un engouement considérable avec le retour de Bonaparte de son expédition en Orient. Les parutions du Voyage de Denon puis la Description de l’Égypte offrent des sources d’inspiration ainsi qu’un important répertoire de motifs. Les têtes coiffées de némès, les sphinx, les sphinges, les têtes de lion, les pseudos-hiéroglyphes, les colonnettes, les palmettes sont autant de sujets qui ornent les meubles, les objets d’art ou encore l’architecture. De nombreuses constructions sont encore visibles, comme le portique l’hôtel de Beauharnais, la fontaine du Fellah rue de Sèvres à Paris ou encore les monuments à la gloire de Desaix ou de Kléber. Pendant la période qui suit l’expédition de Bonaparte, l’appellation utilisée pour désigner cette mode est le style « Retour d’Égypte ».

Napoléon et Joséphine ont toujours avoué leur goût pour l’art égyptien, favorisant les commandes aux artistes et manufactures sur ce thème. Ainsi, la paire de feux aux sphinx est un modèle qui est très à la mode sous le Consulat et l’Empire. Ici, le sphinx est couché sur une base creuse décorée de motifs d’entrelacs et de draperie. Devenant les gardiens du foyer, des modèles équivalents se trouvent dans les chambres de Joséphine et Napoléon à Malmaison. De nombreux artistes, comme Feuchère, Raviro ou encore Thomire, réalisent ce type de feux.

Paire de têtes de chenets reposant sur 2 pieds griffés © Fondation Napoléon
Paire de têtes de chenets reposant sur 2 pieds griffés © Fondation Napoléon

C’est aussi Thomire qui réalise l’athénienne (image ci-dessous). Ce sculpteur de génie donne ses lettres de noblesse au métier de bronzier sous l’Empire. Traditionnellement à trois pieds, ce meuble pouvant servir de brûle-parfum, de jardinière ou de lavabo, est transformé en guéridon avec l’ajout du dessus en porphyre. Elle regroupe un certain nombre de motifs égyptiens : les sphinges, la figure égyptienne, les griffes terminant les colonnettes. La vasque quant à elle présente des palmettes et des fleurs de lotus.  ► En savoir + sur l’athénienne

© RMN-Arnaudet
© RMN-Arnaudet

Mais le goût et la fascination pour l’Égypte ne s’arrêtent pas avec la chute de l’Empire en 1815. Ils perdurent tout au long du XIXe siècle et ce dans le monde entier : on parle alors d’égyptomanie. Au cœur de cette mode, la Description de l’Égypte demeure une somme d’informations et une source de premier ordre, malgré le manque d’exactitude de l’ensemble de la documentation. Elle est notamment utilisée par un certain Jean-François Champollion (1790-1832). Ce dernier, bercé par les souvenirs de l’expédition d’Égypte, étudie les transcriptions de la Pierre de Rosette rapportées par les savants français en 1801. Découverte le 15 juillet 1799 par un soldat français, elle fait partie des biens archéologiques confisqués par les Anglais lors de la capitulation. Son principal intérêt réside en la présence du décret de Memphis copié en trois écritures : l’égyptien hiéroglyphique, l’égyptien démotique et l’alphabet grec. En 1822, Champollion déchiffre les hiéroglyphes. Il est le premier égyptologue de l’Histoire. Les découvertes relatives à l’Égypte ancienne ponctuent l’ensemble du XIXe siècle. En cela, la campagne de l’armée d’Orient a été une source d’inspiration et donc une véritable victoire !

Copie des 3 inscriptions qui se trouvent sur la pierre trouvée à Rosette (estampe de 1799) © BnF/Gallica
Copie des 3 inscriptions qui se trouvent sur la pierre trouvée à Rosette (estampe de 1799) © BnF/Gallica

En complément : « L’Égypte dans le Paris napoléonien », un article de Georges Poisson.

Élodie Lefort
Septembre 2022

Élodie Lefort est responsable des collections de la Fondation Napoléon.