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Charles et Letizia Bonaparte, les parents de Napoléon Ier

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Charles et Letizia Bonaparte, les parents de Napoléon Ier

Qui sont les parents de Napoléon ? Tous deux nés en Corse, Charles Bonaparte et Letizia Ramolino se marient le 1er juin 1764. Il a alors 18 ans et elle 15, et sont loin de se douter de l’avenir de leur famille ! Ils auront ensemble 13 enfants dont 8 vont atteindre l’âge adulte : Joseph (1768), Napoléon (1769), Lucien (1775), Élisa (1777), Louis (1778), Pauline (1780), Caroline (1782) et Jérôme (1784).

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Charles Bonaparte (1746-1785)

Joseph-Charles Marin, buste de Charles-Marie Bonaparte © RMN-Grand Palais - Gérard Blot
Joseph-Charles Marin, buste de Charles-Marie Bonaparte © RMN-Grand Palais – Gérard Blot

Un jeune corse rebellé contre les Français
Né le 27 mars 1746 à Ajaccio, Charles Bonaparte a perdu son père à l’âge de 17 ans. Son oncle, l’archidiacre* de la cathédrale d’Ajaccio, Lucien Bonaparte, décide de le marier rapidement pour lui donner une certaine stabilité. Charles fait ses études de droit à Corte. Mais bientôt la Corse est traversée de troubles. En effet, en 1768, la république de Gênes, endettée, a cédé à la France l’administration de la Corse mais la population de l’île se soulève massivement. Charles Bonaparte suit avec enthousiaste le général indépendantiste Pascal Paoli dans les deux campagnes de 1768 et 1769 contre les Français.
* Archidiacre : Titre donné au responsable de l’administration d’une certaine portion du territoire sous l’autorité de l’évêque.

Ralliement au roi de France
Après la bataille de Ponte-Novo du 9 mai 1769 qui marque la défaite des indépendantistes corses, Charles se rallie aux Français et rentre à Ajaccio. Un an après Joseph, Napoléon naît le 15 août 1769. Ayant fini ses études de droit, Charles prête serment d’avocat, le 11 décembre de la même année et, en 1771  obtient une charge d’assesseur* de la juridiction royale d’Ajaccio, qu’il occupe jusqu’à sa mort.
* Assesseur : Officier de justice adjoint qui assiste les juges, sous l’Ancien Régime.

La reconnaissance de la noblesse familiale
L’une des grandes préoccupations de Charles Bonaparte est d’obtenir la reconnaissance de la noblesse familiale qui lui ouvrirait toutes sortes de droits et privilèges. Elle est enfin reconnue le 10 septembre 1771, après que la famille noble des Bonaparte de Florence, en Italie, a confirmé sa parenté avec celle de Corse. Devenu noble, Charles peut ainsi être élu député de la noblesse d’Ajaccio aux États de Corse l’année suivante, il côtoie les représentants du roi de France et peut développer des relations utiles pour ses affaires. Autre conséquence, Napoléon peut entrer au collège militaire de Brienne en 1779, puis à l’école royale militaire de Paris en 1784, des établissements réservés aux garçons de famille noble.

Les problèmes d’argent
Tout au long de sa vie, Charles Bonaparte fait face à de gros problèmes d’argent car son métier d’avocat ne lui rapporte qu’un salaire modeste. Il est ainsi en procès avec les jésuites qui ont récupéré un héritage qui devait lui revenir une fois sa noblesse reconnue. Cet argent bloqué, il tente de tirer des revenus de terres qu’il possède mais elles ne sont pas très riches. Il entreprend aussi de faire assécher son étang des Salines pour le rendre cultivable et de rentabiliser une pépinière qu’il fait mettre en valeur. Ce problème d’héritage et ces entreprises agricoles l’obligent à aller régulièrement à Paris pour tenter d’obtenir son dû et faire fructifier ses biens.

Une mort prématurée
Gravement malade (les médecins lui diagnostiquent un cancer), Charles doit interrompre ses allers-retours entre la Corse et Paris et s’installer à Montpellier fin 1784. Il confie la gestion de la famille à son fils aîné, Joseph, alors que Napoléon est toujours élève à l’école de Brienne. Après plusieurs mois loin de sa famille, il meurt le 24 février 1785, à moins de 40 ans, et est enterré dans l’église des Cordeliers de Montpellier. Sa dépouille est déplacée en 1803 à Saint-Leu (près de Paris), puis déposée en 1951 dans la chapelle impériale à Ajaccio aux côtés de celle de son épouse Letizia Bonaparte.


Letizia Ramolino

Portrait rétrospectif de Letizia (Anonyme), <br>© Musée national de la Maison Bonaparte
Portrait rétrospectif de Letizia (Anonyme),
© Musée national de la Maison Bonaparte

Née à Ajaccio le 24 août 1749 (ou 1750), Letizia Ramolino est issue d’une famille noble d’origine toscane, installée en Corse depuis plusieurs générations. Elle perd son père à l’âge de 5 ans, et sa mère Angèle-Marie se remarie avec un officier au service des Italiens, François Fesch. En 1763, naît le demi-frère de Letizia, Joseph Fesch, futur cardinal d’Ajaccio puis archevêque de Lyon.

Un mariage soudé
Letizia prend une part importante à la carrière politique de son mari Charles. Lorsque ce dernier choisit d’entrer en résistance contre les Français aux côtés de Paoli, elle le suit dans sa fuite à travers la montagne, dans le maquis, avec leur fils aîné Joseph en bas âge, et alors qu’elle est enceinte de Napoléon. Une fois rallié aux Français, ayant obtenu une situation plus stable et plus riche pour sa famille, Charles peut compter sur son épouse pour développer leurs relations et faire de la maison Bonaparte un lieu en vogue où il est important d’être invité. Ainsi, familier des Bonaparte, le comte de Marbeuf, gouverneur de l’île, obtient des bourses pour les études sur le continent des fils aînés. Cette aide est déterminante, car la situation financière de la famille Bonaparte est fragile pendant des années.

Un veuvage catastrophique
En février 1785, Charles meurt à Montpellier, laissant Letizia dans une situation financière précaire, avec encore quatre enfants à charge. La Révolution française n’arrange rien à la situation en Corse où Paoli a repris la tête d’une insurrection. Les Bonaparte ne le suivent pas dans son opposition contre la France révolutionnaire et sa réclamation d’une indépendance totale de l’île. En mai 1793, Letizia est obligée de fuir Ajaccio tandis que sa maison et ses maigres possessions sont saccagées par les indépendantistes. Elle arrive le 13 juin à Toulon parmi d’autres réfugiés corses. Elle finit par s’installer à l’hôtel de Cypières. Petit à petit son sort s’améliore grâce aux succès de Napoléon : il s’illustre notamment lors du siège de Toulon opposant Britanniques et révolutionnaires français de septembre à décembre 1793, et poursuit une brillante et rapide carrière, devenant général dès 1795.

Assurer l’avenir des enfants
Alors que ses deux aînés, Joseph et Napoléon, entament leurs carrières et se sont mariés (Joséphine de Beauharnais ne plaît pas du tout à la mère de Napoléon), Letizia cherche à assurer l’avenir de ses filles. L’aînée Élisa est ainsi mariée à un officier d’origine corse, Felix Baciocchi, le 1er mai 1797.  À partir de cette période, le rôle de Letizia revient à équilibrer les relations entre ses enfants et calmer les tensions au sein du clan, alors que Napoléon prend le pouvoir, devient Premier Consul puis Empereur, et place ses frères et sœurs à des positions politiques stratégiques.

Les honneurs de « Madame Mère »
Par un décret du 23 mars 1805, Napoléon donne le titre  d’« Altesse impériale Madame, mère de l’Empereur » à Letizia. Dans les cérémonies officielles, elle s’assoit à la droite de l’Empereur. Elle reçoit 300 000 francs par an (qu’elle dépense de manière très économe) et a toute une « maison » à ses ordres : aumôniers, chapelains, dames d’honneur, dames pour accompagner, lectrices, chambellans, secrétaire des commandements, etc. Elle est nommée par son fils protectrice des sœurs de charité et des sœurs hospitalières et gère les donations aux bonnes œuvres pour une somme de 500 000 francs par an. En juin 1805, l’Empereur lui offre le château de Pont-sur-Seine, dans l’Aube.

La fin de l’Empire, la fin de Letizia
Lorsque les coalisés envahissent la France en 1814, Letizia quitte Paris le 29 mars pour Rome où le Pape lui offre l’hospitalité. Mais à l’annonce de l’exil de Napoléon sur l’île d’Elbe, elle le rejoint. Après l’évasion de son fils et son retour au pouvoir à Paris en mars 1815, elle regagne la capitale le 1er juin mais la bataille de Waterloo, le 18 juin, met définitivement fin à l’Empire. Malgré son souhait, Letizia n’accompagne pas Napoléon dans son dernier exil, à Sainte-Hélène. Désormais sous surveillance à Rome, Madame Mère n’a que très peu de nouvelles de son fils. Progressivement, elle développe une sorte de paranoïa qui lui fait croire que Napoléon s’est échappé. Quand elle apprend sa mort en juillet 1821, elle est dévastée. Devenue aveugle et infirme, elle s’éteint le 2 février 1836.

Marie de Bruchard, mai 2017

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